L’histoire de Marie & Les Garçons débute à Lyon au lycée Saint Exupéry en 1975, sous le nom de « Femme Fatale ». Marie Girard était à l’origine au chant, Eric Fitoussi à la guitare, Patrick Vidal à la basse (et au chant) et Philippe Girard à la batterie. Ce dernier quittera le groupe pour rejoindre « Electric Callas » autre groupe Lyonnais et laissera sa place derrière la batterie à sa sœur Marie. Patrick passera à la guitare et au chant et Jean Pierre Charriau rejoindra ensuite le groupe à la basse.
Comme tout groupe de lycée le répertoire de Marie & les Garçons est composé de reprises : Velvet Underground, Roxy Music, Modern Lovers, Bowie... que du beau monde. Après un premier « vrai » concert, un peu à contre emploie, au Festival « Punk » de Mont de Marsan en juin 77, le groupe, lors d’un voyage à Paris, fait parvenir à Michel Esteban ses premières maquettes.
Esteban est tout de suite séduit par la musique très inspiré du Velvet (Marie à la batterie comme Moe Tucker) par le look « Lacoste » étudiant qui lui fait penser à un de ses groupes favoris de l’époque les Talking Heads qu’il a découvert deux ans plus tôt à New York. Mais surtout par un titre : « Re Bop ». Esteban décide de signer le groupe et projette l’enregistrement d’un premier 45 tours.
Trois ans plus tôt à New York en 74, Esteban avait rencontré Patti Smith avec qui il était devenu amie et par son intermédiaire John Cale qui allait produire son premier album « Horse ». Esteban étais un fan inconditionnel de John depuis le Velvet et ensuite durant sa carrière solo et rêvais de travailler avec lui. Esteban lui ai donc envoyé la démo de Marie & Les Garçons pour lui proposer de réaliser le single pour son petit label indépendant qu’il venais de créer et qu’il avais appelé « Rebel Records».
Mais le groupe ne veut pas enregistrer « Re Bop », prétextant que ce morceau est trop vieux et pas représentatif de leur évolution actuelle! Ils veulent enregistrer trois autre titres : « Rien à Dire, A bout de Souffle et Mardi Soir ». N’ayant pas de réponse de Cale, et pas encore appris que la démocratie ne marche pas dans la musique, Esteban capitule et produit lui-même avec le groupe à Paris ces trois titres, qui sortirons en décembre 77. Pour promouvoir le single, Esteban organise le premier concert du groupe à Paris, au Théâtre Mouffetard. Concert mythique qu’il enregistre et dont six titres se retrouveront sur l’ album posthume « Marie et les Garçons ».
Contre toute attente, quelque temps plus tard, John Cale téléphone à Esteban et lui dit vouloir réaliser « Re Bop » car il aime bien ce titre ! Convaincu par une de leurs idoles, le groupe accepte enfin de compte de l’enregistrer. En Mars 1978, tout le monde embarque pour New York. En Studio ils enregistrons deux titres « Re Bop » et « Attitudes ». Mais le groupe continu de ne pas croire en « Re Bop », et veut enregistrer deux versions de « Attitudes », dont une version « noisy ». John qui c’est implique personnellement sur ce single en jouant du piano et du marimba, refuse et interdit le groupe au mixage... Lorsque Esteban reviens du studio et joue les deux titres mixés, le groupe n’est pas entièrement convaincu et veulent mettre « Attitudes » en face A et « Re Bop » en face B du 45 tours...
Profitant du séjour à New York, Esteban booke Marie & Les Garçons au CBGB le 25 mars pour deux concerts avec les anglais X-Ray Specs. Patti Smith jouant au Pavillon de Paris le 26, lui propose de prendre le groupe en première partie. A peine les sets du CBGB terminés que la troupe est dans l’avion et le soir même sur scène à Paris devant plus de 5000 personnes.
En l’espace d’une semaine le petit groupe lyonnais vient d’enregistrer un single à New York avec John Cale, joué au mythique CBGB et fait la première partie de Patti Smith à Paris... Il faudrait être ingrat pour se plaindre !
Le single sortira d’abord sur le label « Rebel Records ». Sans face, ni A ni B, laissant le public décider, et l’histoire juger...
Le disque aura un très bon accueil dans la presse (single du mois dans le magazine Best) et « Re Bop » deviendra le titre emblématique de Marie & Les Garçons. Prouvant de la sorte que le travail d’un producteur est aussi parfois de ne pas être d’accord avec ses artistes et savoir leur imposer sa propre vision de leur travail !
L’année 1978 est intense. Esteban est repartie à New York où il collabore dorénavant avec John Cale sur son label « Spy Records » qu’il vient de lancer et sur lequel sortira pour l’occasion « Re Bop» aux Etats Unis.
En Juin Les Talking Heads à leurs tours propose de prendre Marie & Les Garçons en première partie de leur concert parisien. En juillet l’Olympia organise 3 jours de concerts « Le Rock d’ici » (baptisé sur le disque qui en fût tiré : La nuit du Punk à l’Olympia...) avec la crème des nouveaux groupe français. Marie & les Garçons feront une prestation très remarqué, car adulé par la moitié de la salle et sifflé par l’autre. En effet la Disco a contaminé Patrick Vidal et Eric Fitoussi et la version de « Rien à dire » qui c’est habillé d’un tempo binaire est devenu un hymne à la danse et un medley avec le « Macho Man » des Village People et le « Blood & Honney » d’Amanda Lear.... Les apprentis Punks parisiens y perdront leur latin !
Le « sacrilège » se renouvellera quelques semaines plus tard au Théâtre Antique de Fourvières à Lyon, où Marie & les Garçons, sous une pluie de canettes, essayerons en vain de produire leur vision du Disco Rock en 1978, à un époque où les membres de Daft Punk sont encore en couches culottes... Vincent Palmer le guitariste de Bijou, viendra les sauver du lynchage collectif entraînant avec lui les membres des Starshooter, et de Téléphone qui rejoindrons Marie et les Garçons sur scène pour un rappel haut en couleurs et disco en diable!
Mais la fin de l’été 78 va être fatal au groupe dont les membres masculins reçoivent leur convocation pour aller faire les petits soldats dans notre belle armée française qui n’avait pas encore abolie le service militaire. Ils leurs faudra plusieurs mois pour se faire réformer.
Fin 1978, toujours à New York Esteban quitte John Cale et « Spy » pour lancer ZE Records avec Michael Zilkha et le premier maxi single, sera « Re Bop / Attitudes » et la fameuse version Live de L’Olympia de « Rien à Dire Medley ».
Début 79 Marie et les Garçons sont donc de retour à New York pour l’enregistrement de leur premier album. Une douzaine de morceaux ont été répétés tant bien que mal, mais les dissensions entre Patrick et Marie sont de plus en plus flagrantes. Les deux autres membres du groupes sont à cheval entre les deux positions. Vidal est définitivement tourné Disco, le virus New Yorkais c’est emparé de lui, les autres ne savent plus dans quelle direction aller. On tente des compromis, les premières sessions au Blank Tape Studio, sont désastreuses, l’ambiance catastrophique.
Marie n’arrive pas du tout à jouer Disco. Esteban convoque un batteur de studio, Jimmy Young (le batteur studio des Bee Gees) pour lui montrer comment faire. Jimmy se mets à la batterie avec les autres et c’est la fin de Marie & Les Garçons....
Marie comprends qu’elle ne jouera jamais comme cela, mais surtout qu’elle n’aime pas ce jeux de batterie. Vidal a trouvé le batteur qu’il voulait pour ce disque, Fitoussi et Charriau sont aussi bluffés par la technique, mais tristes pour Marie et tout leurs échappe. Marie rentre à Paris...
En Mars 1979 « Divorce » le premier album des (Marie et les) Garçons sortira. Totalement Disco 20 ans trop tôt !
Huit ans plus tard, en 1987, à l'initiative de Patrick Vidal le groupe se reformera pour ré-enregistrer « Re Bop » (comme quoi il n’y a que les imbéciles qui ne se trompent pas) à Paris financé par une multinationale... qui récupérera au passage l’édition du titre... Mais la magie n’est plus la, ni les bons producteurs. Le titre a un gout de réchauffé servi froid et dans l’indifférence générale chacun retournera vaquer à ces occupations respectives....
Un album posthume « Marie et les Garçons » sortira en 1980 sur ZE Records regroupant, tous les singles et le premier concert parisien. Un témoignage essentiel de trois ans de la vie d’un groupe trop visionnaire pour son époque, n’ayant pas su adapter sa pop Velvet à la déferlante Disco qui allait tout balayer sur son passage. To much to soon comme souvent !